16 septembre - Dakhla - Saint Louis du Sénégal

Il est 5h45. Nos réveils nous tirent d’un sommeil profond et trop court pour effacer la fatigue cumulée pendant les 8 dernières journées de voyage. Mais qu’importe ce matin, c’est la motivation qui nous pousse hors du lit. L’émulation du groupe, quelques protéines d’adrénaline et ce bus qui nous transporte dans la nuit font le reste.

Les contrôles d’accès à l’aéroport étaient moins motivés que nous au réveil. Mais une fois sur le tarmac avec un peu de retard, une partie des 19 appareils a pu se mettre en vol avant le lever de soleil. Le ballet s’est mis en marche, coordonné par Adrien en chef d’orchestre. Après l’avion ouvreur, les vagues Charlie, Alpha et Bravo se sont succédées, les avions décollant à 1 minute d’intervalle.

Nous avons démarré notre moteur à 8h15. Avec 5h30 d’autonomie en régime de croisière, il s’arrêtera vers 13h45, quoi qu’il arrive. Nous prévoyons une arrivée à Saint Louis à 12h45. En cas de problème à l’arrivée, notre solution de repli serait le terrain de “Richard Toll”, à 25 minutes de vol. Donc ça passe ! Nous sommes prêts au départ, nous demandons le roulage à la tour.

Certains n’ont pas l’autonomie nécessaire pour relier directement Saint Louis et devront ravitailler à Nouakchott. Nous ne ferons pas cette escale. Nous survolerons toute la Mauritanie d’un seul trait, car l’avion permet cela : « le vol en ligne droite », comme disait Saint Ex.

En approchant de la Mauritanie, nous devons obligatoirement survoler un point appelé GREGUIRAT. Un poste d’observation y est installé pour scruter les immatriculations de tous les avions à la jumelle. Le paysage est uniforme et pourtant, une immense clôture se dresse à quelques kilomètres de la guérite, partant de la côte vers l’intérieur des terres. C’est la frontière. Comme une balafre.

Les paysages que nous traversons sont hors norme. Ici, à perte de vue, d’immenses formations rocheuses semblent se cramponner au sol pour résister aux vents de la région. Plus loin, des centaines de dunes se baignent dans une eau allant du turquoise à l’ocre. La rétine capte ces images dont il ne restera que des souvenirs plus ou moins précis. Les caméras fixées sous nos ailes et dans le cockpit immortalisent ces instants, pour nous confirmer que nous ne rêvions pas.

À l’approche de Nouakchott, la chaleur monte d’un cran. Il est 11 heures et nous naviguons vers le sud, le soleil nous fait donc face. Nous finissons par calfeutrer le haut de notre verrière avec une couverture de survie pour réduire la cuisson dans le cockpit. Notre consommation d’eau monte à 1 litre toutes les 2 heures.

Le temps passe relativement vite à bord, car il y a toujours quelque chose à faire. On veille les fréquences radio, on échange des informations avec les autres avions. On discute. On dévie nos caps pour prendre des photos, parfois à basse altitude. Et on vérifie régulièrement nos paramètres de vol : vitesse, vent, régime moteur, consommation instantanée, niveau de carburant, température et pression d’huile, ….

Nous avons dépassé Nouakchott sur notre gauche, baignée dans une lumière blanche. Puis progressivement, la végétation est réapparue. Éparse au début, puis de plus en plus dense et entourée de zones marécageuses. Soudain, au-dessus d’une large étendue d’eau, une centaine de flamants roses passe sous nos ailes. L’instant est magique. Nous sommes toujours en Mauritanie.

Nous survolons une magnifique plage de sable blanc en approchant Saint Louis. Des longues pirogues posées sur le sable témoignent de l’intense activité de pêche qui règne ici. Le cœur de Saint Louis se situe sur une île au milieu du fleuve Sénégal. Le reste de la ville s’étend de part et d’autre sur les rives avoisinantes. Nous enroulons ce panorama avant de nous présenter en finale pour nous poser après 4h30 de vol.

Voilà, nous y sommes ! Saint Louis était le dernier contact avec la terre ferme pour les pionniers, avant la traversée de l’Atlantique vers Natal, au Brésil. Pour nous, ce sera le point le plus méridional de notre parcours. Les pilotes de l’époque se reposaient à l’hôtel de la Poste avant de poursuivre leur voyage. C’est là que nous nous rendons également. Nous passerons 48 heures à Saint Louis, pour nous consacrer à plusieurs actions solidaires –+