15 septembre - Laâyoune - Dakhla

“Certaines photos semblent être prises depuis l’espace”, … “combien de temps pourrions-nous tenir au sol, en cas d’atterrissage forcé ?”, … “on ne voit aucune trace de vie, elle semble impossible ici”… En contemplant le panorama saharien sous nos yeux, ce ne sont pas de simples adjectifs qui nous viennent à l’esprit, mais des questionnements ou réflexions, mêlés de crainte et de fascination. Nous n’avons jamais vu le désert d’aussi près, et sans même y avoir vécu ne serait-ce que 24 heures, on mesure instantanément les défis à surmonter pour l’affronter.

Le vol de Laâyoune à Dakhla est une longue traversée de 2h30. Cette fois, nous ne sommes plus aux portes du désert, nous le survolons. Toute panne moteur sans pouvoir atteindre l’unique route reliant les provinces du sud nous mènerait à un crash brutal dans le sable, ou un amerrissage incertain. Nous le savons, cela fait partie des risques de l’aviation légère, où la très grande majorité des avions sont monomoteurs. Mais nous les acceptons, car ils restent faibles malgré tout. Les machines d’aujourd’hui ne sont pas celles des pionniers.

En vol, nos pensées ou réflexions oscillent entre l’apparition d’un risque potentiel et un raisonnement rationnel : nous survolons le désert, nous resserrons notre trajectoire vers cette route salvatrice. Le contrôle aérien nous impose une route à basse altitude au-dessus de l’eau, on se rassure avec des probabilités. Mais la sérénité reste maître, sans quoi ce voyage serait impossible.

Le duo que nous formons fonctionne à merveille. C’était d’ailleurs un des risques identifiés avant le départ, car nous n’avions jamais navigué à ce point ensemble. Nous en avions parlé notamment avec les chefs pilotes en mai, pendant la préparation du raid. Nous savions déjà que nous nous entendions bien sur la terre ferme. Puis cette entente s’est confirmée ces derniers jours, dans notre façon de préparer les vols, d’aborder les risques, de gérer le stress ou de piloter tout simplement. Nous voilà donc sereins pour la suite du voyage !

Dakhla approche, sa presqu’île se dessine petit à petit devant nous. En arrivant au-dessus de la lagune, nous remarquons une multitude de petits traits blancs à la surface de l’eau : des kitesurfers. Dakhla est une référence mondiale pour ce sport. Le « GKA kite surf World Cup » s’y tiendra du 22 septembre au 1er octobre.
Nous entamons la procédure d’approche : « vent arrière », « étape de base main gauche », puis « finale ». Nous sommes « autorisés atterrissage piste 03 » par la tour de contrôle. Nous confirmons la « clearance », posons l’appareil et roulons vers notre point de stationnement. Une magnifique journée de vol s’achève.

Puis, comme chaque soir, les équipages se réunissent pour le « débriefing » du jour, puis le « briefing » du lendemain. La tension monte d’un cran. Car c’est demain que nous rejoindrons l’étape phare de notre Raid : Saint Louis du Sénégal. Et la distance à parcourir sera aussi la plus longue du raid, dans une région aux conditions toujours très hostiles. Nous devons estimer avec précision notre temps de vol et le carburant restant à l’arrivée, pour anticiper une solution de repli en cas de problème. Avec les vents prévus, ce sera juste, mais réalisable. Puis, en cours de briefing, une autre information tombe : demain, nous décollerons avant l’aube… —+